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La théorie des dominos

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La théorie des dominos, un des nombreux arguments idéologiques utilisés par les Etats-Unis au début de la Guerre Froide
La théorie des dominos, un des nombreux arguments idéologiques utilisés par les Etats-Unis au début de la Guerre Froide

Pensée par le Secrétaire d’Etat américain Dean Acheson dès 1947, reprise par D. Eisenhower en 1954, la théorie des dominos s’avère être un corollaire de la doctrine du containment énoncée par le Président Truman en 1947. Dans l’esprit américain, il s’agit d’éviter la propagation du communisme (principalement en Asie) via le soutien à des régimes non-communistes.

Cette théorie a émergé avec l’indépendance du Vietnam ardemment défendue par le leader communiste Ho Chi Minh. Dès 1950, les Etats-Unis souhaitent éviter que tout autre pays que l’Indochine ne devienne communiste (ce qui devint le cas après la victoire de Dien Bien Phu en 1954). Pour le Président Eisenhower, de très nombreux pays de la région (Laos, Cambodge) voire même plus loin (Inde, Japon, etc.) pourrait s’inspirer de l’exemple vietnamien pour se tourner vers le communisme, soutenus par l’URSS, voire la Chine.

La théorie des dominos est purement défensive, contrairement à d’autres doctrines énoncées par le passé par d’autres dirigeants américains (comme la big stick policy). Ici, il s’agit non pas de conquérir des pays devenus communistes, mais bien d’éviter un enchaînement potentiellement dangereux pour l’avenir du capitalisme. Ainsi, Eisenhower puis Kennedy ont soutenu le Vietnam du Sud (séparé du Nord communiste depuis 1954), ce qui a légitimé la présence de soldats américains dans cette région jusqu’en 1975.

En réalité, cette théorie a pris trop d’ampleur dans l’esprit américain, alors impliqué dans une lutte idéologique avec l’URSS. Une fois indépendant et communiste, le Nord-Vietnam n’a jamais agi pour répandre le communisme en Asie du sud-est, comme cela était craint par les Etats-Unis. Et même la défaite américaine de 1975 n’a pas laissé place à une propagation de régimes communistes dans la région, Laos et Cambodge mis à part. Les autres tentatives de mise en place de régimes apparentés communistes (Malaisie, Philippines) ont rapidement échoué.

Cette théorie hanta l’idéologie américaine jusqu’aux années 1980 et se cantonna principalement aux craintes d’une Asie communiste, sans se généraliser à d’autres régions du monde potentiellement proches d’un tel tournant idéologique. Sur le terrain, on peut reconnaître que l’intervention américaine au Vietnam a pu effectivement empêcher la concrétisation d’une telle théorie, notamment pour contrebalancer les aides économiques et militaires soviétiques et chinoises. Néanmoins, dans les faits, les craintes d’un tel effet domino ont été bien loin de se concrétiser.

Aujourd’hui, la crainte du communisme ayant disparu, les penseurs américains ont bien été obligés d’adapter cette théorie des dominos dans leur perpétuelle création d’un ennemi. D’aucuns peuvent penser que, désormais, l’islamisme a remplacé le communisme dans les idéaux de certains néoconservateurs.

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