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Conclusion du conflit musulman aux Philippines : vers une paix durable ?

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Le 25 janvier, la commission électorale des Philippines a validé le vote sur le référendum établissant une région autonome dans la partie musulmane du Mindanao. Cette décision historique achève le processus de paix débuté en 2014 par un accord entre Manille et le Front Moro islamique de libération, un groupe islamiste aux revendications indépendantistes. La création de cette entité autonome intervient alors que le gouvernement philippin tente de se concentrer sur ses problèmes internes, après avoir apaisé les tensions territoriales avec la Chine.

Les présidents Duterte et Xi Jinping se serrent la main.
Duterte parviendra-t-il à assurer la stabilité intérieure pour attirer les investisseurs chinois ?

Le plébiscite du référendum à 87% des voix est une victoire, tant pour le gouvernement que pour les mouvements autonomistes. En effet, la satisfaction des demandes des musulmans indépendantistes permet à Manille d’assurer le calme et l’ordre dans une région qui connaît des troubles depuis plusieurs décennies. Le conflit débute au milieu des années 1960 et alterne entre périodes de négociations et de violences. Les attaques terroristes d’un côté, et la répression gouvernementale de l’autre, font de nombreuses victimes dans les deux camps.

De plus, la lutte contre le mouvement indépendantiste musulman est entremêlée avec l’insurrection communiste de la Nouvelle Armée populaire, la branche armée du Parti communiste des Philippines-marxiste-léniniste. De fait, la région de Mindanao est un bastion prisé des combattants communistes et fait l’objet d’une forte militarisation. Quarante-quatre des quatre-vingt-dix-huit bataillons de l’armée philippine sont basés sur cette île afin de neutraliser les insurgés.

De plus, plusieurs fois par le passé, les indépendantistes musulmans se sont alliés aux guérillas communistes dans le but d’augmenter leurs forces respectives. Ainsi, en éliminant la menace d’un conflit avec les premiers, le gouvernement de Manille affaiblit les seconds. Toutefois, Mindanao demeure un terrain d’affrontements. La région est sous le coup de la loi martiale depuis 2017.

Mindanao, sous l’ombre de la menace terroriste

Le Sud des Philippines, incluant l’île de Mindanao, est particulièrement touché par la présence de groupes terroristes islamistes. De mai à octobre 2017, une bataille sanglante a opposé les forces gouvernementales aux djihadistes de l’Etat islamique dans la ville de Marawi. Quatre cent mille personnes ont été déplacés à la suite de ce conflit. Si Manille a remporté la victoire, l’ombre du terrorisme plane toujours sur le pays. En effet, les Philippines représentent un important vivier de combattants pour le groupe Etat islamique.

Le président Rodrigo Duterte, élu en 2016, a fait de la lutte contre le terrorisme l’une de ses priorités. Elu pour son programme populiste et ses déclarations agressives, le président philippin a capitalisé sur les questions sécuritaires et les difficultés économiques auxquels font face la classe moyenne pour séduire l’électorat.

Un frein au développement économique

Malgré des progrès importants, un cinquième de la population philippine vit toujours sous le seuil de pauvreté. De plus, 40% des travailleurs sont employés dans le secteur informel. De fait, le gouvernement peine à collecter suffisamment d’impôts afin d’investir dans de meilleurs services et infrastructures. S’ajoute à cela un important niveau d’inégalités de richesse. En effet, 0,01% de la population possède plus d’un million de dollars, un montant qui s’élève à seulement 10 000 dollars pour près de 87% des Philippins. Ainsi, le président a promis de réduire ces écarts.

Pour atteindre cet objectif, sécuriser le territoire est essentiel. Selon lui, le trafic de drogues, la corruption et la criminalité en général sont des barrières au développement socio-économique. A travers une campagne de répression ultra-violente et extra-judiciaire, Duterte a fait démonstration de sa volonté d’éradiquer les problèmes endémiques par toutes les voies possibles.

Ainsi, assurer l’ordre dans la région de Mindanao est une priorité pour le gouvernement. En effet, cette dernière abrite d’importantes ressources naturelles et joue un rôle majeur dans l’économie nationale. 100% du caoutchouc et 87% de l’ananas produits par les Philippines se trouvent sur l’île. 76% des réserves d’or nationales sont également situées dans la région, faisant de Mindanao un atout économique primordial.

Accalmie avec la Chine, éloignement avec les Etats-Unis

Depuis le début de son mandat, Duterte a entrepris l’apaisement des relations houleuses qu’entretenaient les Philippines avec la Chine, notamment sur la question territoriale en mer de Chine méridionale. De fait, une partie des ressources militaires autrefois allouées à la défense maritime ont pu être redirigées pour sécuriser les territoires nationaux conflictuels. Manille n’est pas la seule à bénéficier de ce nouveau partenariat. Pour Pékin, la bonne entente avec ses voisins asiatiques est cruciale afin de pouvoir développer ses ambitions économiques, qui se traduisent, notamment, par son projet titanesque des Routes de la Soie.

Ainsi, en 2016, seulement trois mois après son investiture, le président philippin a rendu visite à son homologue chinois. A l’occasion de cette rencontre, ils ont annoncé des investissements et des crédits à hauteur de 24 milliards de dollars. Toutefois, ces promesses sont loin de s’être toutes réalisées. En effet, seulement une petite partie de ces investissements ont été effectués. Un certain nombre de projets ont dû être abandonnés du fait de problèmes sécuritaires internes, parmi lesquels, l’insurrection musulmane sur l’île de Mindanao. Ainsi, la sécurisation du territoire nationale est une condition sine qua none si Manille souhaite assurer les financements étrangers.

Parallèlement à la détente sino-philippine, les relations entre les Etats-Unis et les Philippines se sont dégradées. A plusieurs reprises, les présidents des deux pays se sont critiqués, voire insultés, par déclarations interposées. Cependant, cet éloignement est à relativiser. En effet, les Etats-Unis demeurent le premier investisseur pour les Philippines et ont tout à gagner à préserver leur allié historique régional, face à la montée en puissance de la Chine.

La fin du conflit avec les musulmans indépendantistes ne signifie pas la fin des problèmes pour Manille, qui doit faire face à d’autres insurrections, communiste notamment. De plus, le gouvernement devra parvenir à maintenir l’équilibre entre ses alliés chinois et américains, s’il veut assurer la stabilité du pays.

Sources

https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2017/10/23/philippines-le-gouvernement-annonce-la-fin-des-combats-contre-les-djihadistes-a-marawi_5204628_3216.html?xtmc=marawi&xtcr=1

https://worldview.stratfor.com/article/after-siege-marawi-another-fight-plays-out

https://worldview.stratfor.com/article/philippines-manila-takes-long-awaited-step-toward-calming-mindanao-jihadism-security

https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/philippines/

https://www.indexmundi.com/philippines/economy_overview.html

https://worldview.stratfor.com/article/philippines-waits-chinese-windfall

https://worldview.stratfor.com/article/duterte-walks-tightrope

https://worldview.stratfor.com/article/philippines-ratified-referendum-paves-path-toward-peace-mindanao-bangsamoro-autonomous-region

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Clara JALABERT

Clara JALABERT est étudiante en Master International Security à l'école d'affaires internationales de Sciences Po. Elle se spécialise dans l'étude de l'Asie et des risques sécuritaires.

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