Argentine : une composition gouvernementale qui interroge
Javier Milei a officiellement été investi comme président de la République d’Argentine le 10 décembre 2023. Depuis le 19 novembre, la liste des futurs ministres a connu de nombreux changements et rebondissements. Des proches de Javier Milei ont été évincés, l’ancienne rivale Patricia Bullrich obtient le ministère de la Sécurité ou encore le ministère de la Santé n’a finalement pas été supprimé comme l’avait annoncé le nouveau président. Alors que la première réunion de ce gouvernement a eu lieu le lundi 11 décembre, qui sont les ministres de Javier Milei ?
Des proches de Mauricio Macri aux côtés de Javier Milei
Bien que Javier Milei attribue tous les maux de l’Argentine a ce qu’il appelle la « caste politique », il use des mêmes moyens que celle-ci. Après une alliance avec le parti de Juntos por el Cambio entre les deux tours des élections, Javier Milei s’entoure des proches de l’ancien président Mauricio Macri pour s’assurer des votes au Congrès. Ainsi, Javier Milei a légué le poste de ministre de la Sécurité à son ancienne rivale Patricia Bullrich. De même, Luis Petri, un proche de Mauricio Macri, a été désigné comme ministre de la Défense.
Mais c’est réellement l’arrivé de Luis Caputo au poste de ministre de l’Economie qui démontre l’importance de cette alliance pour le nouveau président. Luis Caputo a été le ministre des Finances de Mauricio Macri, puis le président de la Banque Centrale. Il a notamment joué un rôle central dans l’obtention du dernier prêt accordé par le FMI que le pays doit aujourd’hui rembourser. Un remboursement qui participe à la déstabilisation de l’économie argentine. De plus, son nom est ressorti lors du scandale de Paradise Papers, démontrant ses liens occultes avec certaines entreprises offshores. L’arrivée d’un proche de Mauricio Macri à un poste clé dans le gouvernement de Javier Milei interroge. D’autant plus que cette ascension rime avec l’évincement d’Emilio Ocampo. Or, ce dernier était présenté comme l’architecte du projet phare de Javier Milei : la dollarisation de l’économie argentine.
De 21 à 9 ministères
Pour atteindre son objectif de réduction drastique des dépenses publiques Javier Milei a supprimé plusieurs ministères et en a fusionné d’autres. Cela aboutit à la création de deux « supers ministères » qui sont : le ministère des Infrastructures et celui du Capital Humain. Le ministère des Infrastructures regroupe les anciens ministères des Transports, des Travaux publics, des Mines, de l’Energie et des Communications. Il sera dirigé par Guillermo Ferraro. Ce dernier a travaillé durant 13 ans pour la branche argentine de la multinationale KPMG. Il aura la charge de mener l’ensemble des privatisations promises par Javier Milei dans ces secteurs.
Le ministère du Capital Humain regroupe quant à lui les ministères du Développement social, du Travail et de l’Education. Sandra Pettovelo une proche de Javier Milei et ancienne journaliste en sera la ministre. D’autre part, Javier Milei est revenu sur sa proposition d’incorporer le ministère de la Santé au sein du ministère du Capital Humain. Mario Russo, un proche de Mauricio Macri dirigera ce ministère.
Des personnalités provenant du secteur privé
D’autres ministères auront à leur tête des personnalités qui ont largement évolué dans le secteur privé. C’est notamment le cas de l’économiste Diana Mondino, nouvelle ministre des Relations extérieures de l’Argentine. Elle a travaillé pour les départements financiers de nombreuses entreprises privées et a créé une agence de notation rachetée par Standard & Poor’s. Lors de la campagne de Javier Milei, elle a affirmé que l’État argentin ne devait pas avoir de relations directes avec les gouvernements dits communistes et que les relations commerciales devaient se cantonner à la sphère privée.
Guillermo Francos, l’ancien représentant de l’Argentine à la BID qui a démissionné en août 2023 pour rejoindre le camp de Javier Milei, sera à la tête du ministère de l’Intérieur. Lui aussi provient du secteur privé. Il a occupé plusieurs postes au sein de la direction du groupe Eurnekian, dans lequel le nouveau président a également travaillé.
Enfin, une autre nomination qui interroge est celle de Mariano Cuneo Libarona à la tête du ministère de la Justice. Cet avocat s’est fait connaitre en défendant des membres de la famille de l’ancien président Carlos Menem dans une affaire mêlant, corruption, trafic de drogue et trafic d’armes dans les années 1990. Aussi, dans le cadre de cette affaire, Mariano Cuneo Libarona a été emprisonné durant 1 mois.
Face à ces choix, une nouvelle fois les Argentins semblent divisés. D’un côté les partisans de Javier Milei continuent à croire en ces changements radicaux promis par le nouveau président. Les autres restent dubitatifs et présentent ce nouveau gouvernement comme un gouvernement dirigé en sous-main par Mauricio Macri. Pour l’heure, l’unique variante qui reste constante dans le pays est celle de l’incertitude. Une incertitude qui planait durant les élections et qui continue à faire pression sur une société argentine épuisée.