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L’Allemagne ou le paradoxe de l’Union Européenne

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Pays fondateur de l’UE, plus grande puissance économique européenne et aujourd’hui en position de force dans l’UE, l’Allemagne peine à se trouver un véritable positionnement dans l’évolution du projet d’intégration européen et la gestion de la crise. Revenons sur les paradoxes allemands vis-à-vis de l’Europe.

Un constat politique tout d’abord : l’opinion allemande se caractérise pat un euroscepticisme qu’on pourrait qualifier aujourd’hui d’endémique. Le passage du Mark à l’Euro a été un premier traumatisme pour la population qui a vécu ce changement comme un véritable affaiblissement, au-delà même du symbole. Et la crise actuelle a tout fait pour conforter les Allemands dans l’idée que leur pays paie les pots cassés de la crise économique à la place des pays européens ayant eu une gestion de crise hasardeuse consécutivement à un certain laxisme budgétaire. Pourtant on constate que les partis politiques allemands les plus eurosceptiques, comme le CDU (parti Chrétien Démocrate d’Angela Merkel) et le FDP (les libéraux) sont en perte de vitesse, quand d’autres partis plus pro-européens comme les Sociaux-démocrates ou les Verts (qui affirment quant à eux leur volonté de fédéralisme dans la création d’Etats-Unis d’Europe) connaissent un certain succès électoral. L’explication de cet euroscepticisme non assumé pourrait se trouver dans le rapport complexe de l’Allemagne post-1945 à l’Europe : oscillant entre culpabilité (donc refus d’une prise de position clairement nationaliste) et volonté d’émancipation vis-à-vis du passé (ce que les Allemands nomment « Vergangenheitsbewältigung »).

Dans le contexte actuel de crise de la gouvernance économique en Europe, l’incapacité des dirigeants allemands à prendre une position claire pèse lourdement sur l’avenir de l’Union.

L’Allemagne cherche en effet à concilier deux objectifs a priori antagonistes : éviter à tout prix la mise en commun des dettes nationales, sans pour autant abandonner la monnaie unique. La véritable question restant : dans quel but ? Que cherche l’Allemagne dans l’Europe ? Ces interrogations ont d’autant plus d’importance que la crise soulève la question de la création d’eurobonds, de la renégociation des traités européens, de la mise en place d’un système fédéral à proprement parler ainsi que de la réfection des institutions. Et la classe politique allemande est très divisée sur le sujet. Les grandes personnalités comme Joschka Fischer (Verts), Gerhard Schröder (Social-démocrate) ou Ursula Von der Leyen (CDU) se prononcent pour une meilleure intégration et encouragent le fédéralisme. A l’inverse, Angela Merkel refuse cette idée, ainsi que la mise en place d’eurobonds, leur préférant une règlementation budgétaire plus stricte qui ne pénaliserait pas le pays. Et l’affrontement politique le plus intéressant est encore celui entre cette dernière et son ministre de l’économie et des finances, Wolfgang Schaüble, en faveur d’une plus grande union politique et qui s’est même prononcé pour d’une perte de souveraineté éventuelle sur le budget de l’Etat pourvu qu’elle garantisse une meilleure intégration.

Autant de questions auxquelles l’Allemagne devra répondre et  de paradoxes à dépasser pour être à même de conduire l’Europe vers une sortie de crise efficace.

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