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Ukraine: une guerre locale en passe de devenir mondiale ? (3/7)

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La Seconde Guerre mondiale a été le théâtre de la montée en puissance du Reich allemand ambitionnant de faire de l’Europe continentale une puissance impériale terrestre, économiquement unifiée, capable de rivaliser militairement et économiquement avec les puissances thalassocratiques britannique et américaine. Et, sans hésiter, entre la puissance impériale industrielle et commerciale allemande, et le capitalisme d’État despotique soviétique, les puissances maritimes anglo-américaines surent très vite faire leur choix… 

La domination allemande sur l'Europe bouleverse l'équilibre des puissances sur le Vieux Continent, dès 1940
Dès 1940, l’Allemagne domine l’Europe continentale.

L’Allemagne se fait Europe

« Le Rhin, fleuve allemand, mais non frontière de l’Allemagne », Ernst Moritz Arndt.

L’humiliation imposée à l’Allemagne par le Traité de Versailles fût l’un des principaux substrats sur lequel s’appuya Hitler, lors de son accession au pouvoir à partir de 1933. Son objectif était clair. Il fallait bâtir une Allemagne suffisamment puissante militairement, et autonome économiquement afin de pouvoir résister à un nouvel embargo. C’est cette logique de renforcement de l’autarcie économique qui le poussa à annexer l’Autriche, puis la Tchécoslovaquie. Ces territoires étaient riches en ressources minières et agricoles.  Plus tard, lorsque la Pologne fût envahie par les armées allemandes le 1er septembre 1939, la Seconde Guerre mondiale débuta.

En 1940, la France fût militairement défaite par les armées allemandes. Désormais, Hitler a assis l’hégémonie allemande sur le continent européen. La France était à terre. Aux yeux du Führer, les États-Unis d’Amérique, ainsi que le Royaume-Uni représentaient les principales menaces pour la puissance commerciale allemande. Le chancelier du Reich envisagea de réaliser le projet qu’il avait clairement défini dans Mein Kampf : faire de l’Europe un empire continental unifié, en capacité de rivaliser économiquement avec les puissances thalassocratiques anglo-américaine. C’est dans cette optique qu’il proposa au Royaume-Uni de reconnaître sa domination continentale. En échange de cela, il s’engageait à reconnaître la suprématie britannique sur les mers. Ce que Winston Churchill refusa. L’Allemagne, qui avait pris le contrôle du Vieux Continent, était devenue un adversaire économique beaucoup trop dangereux , tant pour les États-Unis que pour le Royaume-Uni.

La destruction de l’axe Allemagne-Russie

À la veille de la Seconde Guerre mondiale, le Pacte germano-soviétique d’août 1939 a créé la panique, autant au Royaume-Uni qu’aux États-Unis.  Il s’agissait d’un accord de non-agression conclu entre le IIIe Reich et l’URSS. Ce dernier rapprochait significativement l’Europe et la Russie. Cela amenait nécessairement à l’éviction des Américains, dans la gestion des affaires européennes. La Seconde Guerre mondiale était alors devenue inévitable. Il fallait, pour les Anglais, comme pour les Américains, impérativement préserver l’équilibre des puissances sur le Vieux Continent. Ce qui impliquait de mettre fin à l’expansion militaro-industrielle allemande, à travers l’Europe.

Alors qu’au XIXe siècle, avec Napoléon, la terreur des Anglo-Saxons était française, au XXe siècle, elle fût allemande. La Russie, dans les deux cas, n’a nullement été un acteur central. Elle a servi, une première fois de force d’appui aux Britanniques, pour infliger une défaite à l’Empire français napoléonien, dans le cadre d’une coalition anti-française. Puis, Américains et Britanniques s’appuyèrent une seconde fois sur elle pour infliger une défaite au Reich allemand, en 1945.

À partir de 1945, les États-Unis se trouvaient être la seule puissance industrielle encore debout. Désormais, la domination de l’Europe sur le monde s’achevait pour laisser place aux États-Unis d’Amérique. Le bloc occidental représentait le monde de la libre concurrence économique. Ceci implique nécessairement des gagnants et des perdants. Dans le monde post-1945, l’idée de la survenance d’une troisième guerre mondiale entre deux puissances nucléaires, soviétique et américaine, était toutefois devenue la nouvelle hantise du monde.

La course aux symboles

Le désir, qui était celui des États-Unis, de la France ou encore de l’URSS de posséder l’arme atomique, trouvait davantage son fondement  au niveau du symbole de puissance que celle-ci octroyait à la nation qui l’acquérait, qu’à la volonté d’effectivement s’en servir. Tout cela relevait d’une compétition pour le prestige, à l’instar de la course à la conquête spatiale entre Soviétiques et Américains. Les Soviétiques ont envoyé les premiers un homme, au-delà de l’exosphère. Cependant, cette compétition fût définitivement remportée par les Américains, le 21 juillet 1969, lorsque Neil Armstrong fit, sur la Lune, son fameux petit pas d’homme qui était un grand pas pour l’humanité. Une guerre nucléaire entre Américains et Soviétiques était devenue matériellement possible, dans le monde post-1945, mais rationnellement peu probable. Aux États-Unis, nombreux étaient, toutefois, ceux qui avaient intérêt à entretenir l’idée contraire. Premièrement, cela offrait subventions publiques et débouchés commerciaux à ce que le président américain Eisenhower nomma complexe militaro-industriel, avant de mettre en garde ses compatriotes contres les influences néfastes que sa montée en puissance pouvait avoir sur la vie politique américaine, lors de son discours du 17 janvier 1961. Deuxièmement, la Menace Rouge justifiait l’intervention américaine dans les affaires européennes. Empêchant, ainsi, le renforcement politique, miliaire et économique d’une Europe occidentale tournée vers l’URSS, mettant à mal la suprématie américaine.

3/7

Sources

  • Brzezinski, Zbigniew, 2011, Le Grand échiquier: l’Amérique et le reste du monde, Pluriel.
  • Laïdi, Ali, 2016, Histoire mondiale de la guerre économique, Perrin.
  • Tooze, Adam, 2012, Le salaire de la destruction : formation et ruine de l’économie nazie, Ed. Les Belles Lettres.
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Yoann Lusikila

Yoann Lusikila est diplômé de science politique à l'Université de Lausanne. Il s'est spécialement intéressé aux enjeux de sécurité internationale, et de guerres économiques, à l'aune de la globalisation économique.

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