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Le recul des gauches en Amérique du Sud

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Quasiment hégémoniques sur le continent sud-américain pendant près d’une décennie, les gauches sud-américaines ont accumulé depuis la fin de l’année 2015 une série de défaites bouleversant les équilibres géopolitiques de cette région du monde. Retour en cartes sur ce phénomène et ses explications.

Il y a plusieurs mois, nous constations une érosion de ces gauches sud-américaines depuis l’élection fin-2015 de Mauricio Macri à la présidence de l’Argentine face au candidat péroniste. Quelques semaines plus tard, le Venezuela en pleine crise économique offrait la majorité à l’Assemblée à l’opposition, plongeant le pays en situation de blocage institutionnel. En 2016, ce sont le Pérou et le Brésil qui virent leurs exécutifs basculer. Le premier vit la victoire du libéral Pedro Pablo Kuzcynski alors que la gauche socialiste au pouvoir n’était même pas présente au second tour, tandis que le second vécut la destitution de sa présidente Dilma Rousseff le 31 août au profit de Michel Temer qui gouverne difficilement depuis avec une coalition de centre-droit. Ce phénomène de balancier s’est accentué au cours des dernières élections municipales au Chili où l’opposition conservatrice s’est imposée et au Brésil où le Parti des Travailleurs de Dilma Rousseff a subi une sévère défaite. En Bolivie, Evo Morales a essuyé le refus de la population de modifier à nouveau la Constitution pour lui permettre de se représenter, bien que son parti cherche à tout prix à le maintenir au pouvoir. La seule défaite pour la droite en Amérique du Sud pendant l’année écoulée fut la victoire du « non » au référendum sur le traité de paix avec les FARC en Colombie. Toutefois, ce rejet du texte est venu en partie de la droite dure colombienne, contre le gouvernement de centre-droit de Juan Manuel Santos.

Cette transition politique a donc touché l’ensemble des gauches sud-américaines. La gauche dite « réformiste », républicaine et alliée au centre, a perdu le pouvoir dans plusieurs pays, et pourrait subir également une défaite au Chili lors des prochaines présidentielles. La gauche « radicale » ou « populiste » d’inspiration bolivarienne s’est quant-à-elle maintenue au pouvoir au Venezuela, en Équateur et en Bolivie, mais a été écartée en Argentine. Comment expliquer ce phénomène ? Tout d’abord, l’un des facteurs explicatifs les plus évidents tient à la conjoncture économique traversée par le continent sud-américain : le Brésil et le Venezuela sont en récession depuis plusieurs années, et d’autres pays comme le Chili ont une croissance économique faible, pâtissant de la baisse des prix des matières premières. Ce contexte a pu remettre en cause les politiques redistributives mises en places depuis l’arrivée de ces gouvernements. Cependant, le facteur économique n’est pas suffisant dans la mesure où des pays avec une croissance solide ont vécu une alternance, comme le Pérou. Les gauches se retrouvent avec une crise d’incarnation après une décennie marquée par des figures emblématiques. Ainsi, Lula et José Mujica sont partis, Nicolás Maduro n’est pas parvenu à s’imposer après la mort de Chávez et perdu la majorité au Parlement, Evo Morales n’a pas d’héritier ce qui pousse ses proches à chercher tout recours légal pour le faire réélire en dépit du « non » au référendum et Rafael Correa ne se représentera pas à la présidence équatorienne. Les conséquences géopolitiques de cette transition commencent à voir le jour, dans la mesure où le Venezuela a été suspendu du MERCOSUR le 1er décembre 2016 après avoir perdu tous ses alliés au sein de l’institution. Reste à savoir si cette transition politique du continent sud-américain se poursuivra en 2017 et si les institutions d’intégration régionale sauront résister aux divergences idéologiques croissantes entre les gouvernements.

Pour un bilan de l’année écoulée pays par pays :

Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Colombie

Equateur, Paraguay, Pérou, Uruguay, Venezuela

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Lucas MAUBERT

Doctorant en Histoire à l'Université de Tarapacá (Chili). Diplômé de l'IEP de Rennes et de l'Université Rennes 2. Rédacteur pour Les Yeux du Monde depuis 2016.

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