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Rétrospective 2013 : La destitution de Morsi et l’avenir du Printemps Egyptien

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Le pays arabe le plus peuplé au monde a vécu une année 2013 très mouvementée, balançant entre les espoirs toujours vivants de véritable démocratie nourris par les promesses d’un Printemps Arabe ayant mis fin au règne d’Hosni Moubarak et les manifestations à l’encontre du président Mohamed Morsi, accusé d’utiliser sa position pour corrompre cette même démocratie et promouvoir les idées islamistes des Frères Musulmans. Le 3 juillet 2013, le général Al-Sissi, chef d’Etat-major des armées d’Egypte, annonçait que la Constitution était suspendue et que le président Morsi serait jugé pour avoir ignoré les revendications du peuple, achevant ainsi de polariser l’Egypte en deux camps tout aussi vindicatifs l’un que l’autre.

Des grandes contestations des opposants aux Frères Musulmans et à leur héraut, le président Mohamed Morsi, l’Egypte est passée aux manifestations des conservateurs dénonçant le coup d’Etat opéré par le nouvel homme fort au Caire, le général Abdel Fattah Al-Sissi.

Alors que la destitution d’Hosni Moubarak en 2011 avait suscité beaucoup d’espoir quant à la démocratisation de la politique Cairote, beaucoup ont déchanté à la vue de la Constitution révisée soumise au vote le 15 décembre 2012 et approuvée à 64% environ (mais avec un taux de participation particulièrement faible : 36%). Dès lors, les affrontements entre les forces de police et les opposants au régime ont monté en intensité, alternant entre sit-ins décomplexés et émeutes, souvent sévèrement réprimées.

Depuis le 4 juillet, les soutiens du président Morsi sont, à leur tour, descendus dans la rue en masse pour protester contre le coup d’Etat. Malgré une forte mobilisation ainsi qu’une médiation internationale assez forte pour éviter tout bain de sang, les militaires à la tête de l’Etat ont rapidement perdu patience et durci leur traitement des manifestants, notamment à partir du terme du mois de Ramadan. Chaque nouvelle manifestation des « pro-Morsi » s’accompagne de son lot d’arrestations en masse et de ses victimes issues de tous âges.

Récemment, le pouvoir en place, dévoué, sur le papier, à la cause d’une véritable transition démocratique, a même fortement restreint les libertés d’expression des manifestants. En effet, une loi promulguée le 24 Novembre 2013 interdit les rassemblements et manifestations non-autorisées au préalable et dont le but serait de faire respecter la sécurité tout en autorisant les forces de police à faire une « utilisation graduée de la force » en cas de violences à leur encontre. Ceci constitue un véritable recul des libertés sans précédent, même sous l’ère Moubarak. La mesure est également vivement condamnée par Amnesty International qui considère que cette loi « donne carte blanche aux forces de sécurité pour utiliser une force excessive, notamment létale, contre les manifestants ».

Le 14 décembre dernier, on pouvait croire que l’Egypte était de nouveau sur les bons rails puisque le président par intérim, Adli Mansour, annonçait que le projet de nouvelle Constitution, très favorable à l’armée et adoptée par le Parlement le 1er décembre, serait soumis à un référendum les 14 et 15 janvier 2014. Toutefois, les Frères Musulmans ont, de manière prévisible, immédiatement appelé au boycott de cette échéance, soulignant ainsi le fossé qui sépare désormais les conservateurs des libéraux en Egypte.

Parachevant cette année 2013 de tous les dangers, l’attentat à la voiture piégée visant les forces de police à Mansoura le 24 décembre 2013 (environ 170 kilomètres à l’Est d’Alexandrie) a servi de prétexte aux autorités pour déclarer, sans enquête préalable, que les Frères Musulmans (qui n’ont pas revendiqué l’attentat) étaient désormais officiellement considérés comme une organisation terroriste, faisant ainsi craindre une chasse aux sorcières puisque le vice-premier ministre, Mr Hossam Eissa a également déclaré que le gouvernement punirait, conformément à la loi, quiconque appartiendrait à ce groupe. Depuis, deux autres attentats ont été recensés en Egypte mais c’est un tournant international que vient de prendre le conflit interne égyptien puisque le gouvernement a officiellement demandé aux autres pays arabes de lutter également contre la confrérie.

En somme, cette année 2013 a vu l’Egypte sombrer dans la spirale de la violence. 2014 n’augure rien de bon. Reste à espérer qu’à l’avenir Al-Sissi suive davantage l’exemple d’un Mustafa Kemal Atatürk plutôt que d’un Mouammar Kaddhafi afin que l’Egypte puisse, sur le (très) long terme réaliser ses rêves de démocratie.

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