Netanyahou, un représentant du sionisme révisionniste, qui vise à affaiblir l’État de Droit israélien
Le ministre de la Justice Israélien, Yariv Levin a présenté un projet de loi pour affaiblir le pouvoir de la Cour Suprême, une des institutions les plus importantes du pays. Cela met en lumière les projets du nouveau gouvernement de Netanyahou.
Le retour de Benyamin Netanyahou
Plus d’un an après son éviction par une coalition hétéroclite menée par Yaïr Lapid, rassemblant des partis de droites, centristes, de gauches, et même arabes (Raam, parti d’inspiration des frères musulmans), Benyamin Netanyahou, de son surnom Bibi, vient d’être réélu premier ministre par la Knesset le 1er novembre 2022 à la suite de tractations politiques. Il s’est allié avec des partis ultras orthodoxes revendiquant des formes d’intégralismes à l’image de la liste « Sionisme religieux ». L’alliance du Likoud, le parti de Netanyahou, avec des partis ultras orthodoxes n’est pas nouvelle. Elle s’inscrit dans une offensive du sionisme révisionniste depuis quasiment 50 ans. Cela amène à un contexte de régression démocratique, de forte diabolisation des opposants politiques (gauche, ONG, arabes israéliens, palestiniens) et d’intensification de la colonisation en Cisjordanie.
Le sionisme rejoint la notion d’intégralisme considéré comme une politisation excessive de la religion ou comme le dit le chercheur Jean-Marie Donegani « Le propre des modèles intégralistes tient dans tout ce que la vision du monde est organisée autour d’une référence religieuse ». Israël est donc un État basé sur une identité religieuse. Cela met en tension son aspiration à être une démocratie libérale et un État de droit avec son essence religieuse qui n’inclut pas les arabes musulmans et chrétiens qui habitent le territoire.
Un Premier ministre porteur du projet du sionisme révisionniste
La rhétorique et l’action de Netanyahou s’inspirent de l’idéologie révisionniste de Jabotinsky lors du mandat britannique. Elles consistent à saper les accords d’Oslo, délégitimer l’autorité palestinienne et progresser pas à pas dans l’entreprise coloniale en Cisjordanie. Il associe les socialistes israéliens d’être de connivence avec les représentants palestiniens. Il les considère comme des terroristes avec lesquels il n’y a pas de possibilité de négociations. La réalité est cependant plus complexe. Dans le cadre des accords d’Oslo, les autorités israéliennes collaborent de fait avec les Palestiniens. Dans la gestion des affaires quotidiennes ou pour des questions relatives à la sécurité et aux échanges économiques.
Son opposition aux accords d’Oslo se prolonge en 2014. En effet, il promeut la loi sur « l’ancrage constitutionnel pour le statut d’Israël comme État national pour le peuple juif ». Cela rentre en contradiction avec les lois fondamentales instituées par Ben Gourion. Elles définissent Israël comme un État de droit avec des garanties de libertés publiques. Netanyahou est favorable à une colonisation annexionniste de la Cisjordanie. Il renie avec cette loi les principes fondateurs qui ne seraient pas appliqués aux populations arabes en cas de colonisation totale de la Cisjordanie.
Un projet de loi qui affaiblirait la Cour Suprême et l’État de droit
Dans le contexte actuel, ces explications permettent d’éclairer et d’apporter un regard historique sur l’actualité. En effet en janvier 2023, le nouveau ministre de la Justice Yariv Levin a présenté un projet de loi visant à restructurer le système judiciaire. Des lois fondamentales, et non une Constitution, régissent le pays. La Cour Suprême, plus haute autorité judiciaire indépendante, exerce un contrôle de constitutionnalité. Elle contrôle les lois votées à la Knesset et les décisions juridiques du gouvernement. Le nouveau gouvernement souhaite mettre fin au contrôle de la Cour Suprême sur les décisions du gouvernement et du Parlement. Il souhaite également renforcer son emprise sur l’institution, en permettant aux députés majoritaires d’en nommer les membres. Yariv Levin dénonce un gouvernement des juges. Il soutien que sa réforme « renforce la démocratie, réhabilite la gouvernance, restaure la confiance dans le système judiciaire et rééquilibre les trois branches du gouvernement » (Times of Israël).
Cependant l’opposition et le corps judiciaire s’opposent au projet de loi, dénonçant une menace pour l’État de droit. Esther Hayut, Présidente de la Cour Suprême a déclaré « Le nouveau projet du ministre de la Justice ne vise pas à améliorer le système judiciaire mais à l’écraser » (Times of Israël). Dans cette optique, le 14 janvier 2023, à Tel Aviv, 80 000 personnes se sont réunies pour manifester et dénoncer la réforme.
Cette loi fait partie d’une dynamique plus globale portée par le gouvernement le plus à droite qu’est connu Israël. Les mouvements sionistes révisionnistes et religieux qui en font partie clivent la société. Leurs rhétoriques populistes et leurs formes d’intégralismes juifs mettent en danger les lois fondamentales. Elles attisent également les tensions sur la question palestinienne.