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Pékin veut construire une base militaire en Afghanistan

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La frontière sino-afghano-tadjike

Un officier afghan a déclaré que la Chine allait construire une base militaire dans la province de Badakhchan, à la frontière afghano-tadjike. Pékin cherche à s’affirmer ainsi comme puissance stabilisatrice en Asie centrale.

Le corridor afghan

Dans sa stratégie de nouvelle route de la soie, la Chine veut exporter ses produits et sécuriser ses importations énergétiques. C’est pourquoi, en parallèle de la construction d’infrastructures, il est nécessaire pour Pékin de pacifier la région. Kaboul connait aujourd’hui un triple problème militaire : la lutte contre les Taliban, la lutte contre Daesh et la lutte contre les milices locales comme le réseau Haqqani. L’Afghanistan est fondamental dans la stratégie chinoise car il permet de relier l’Asie centrale et la Chine au port chinois de Gwadar, au Pakistan, débouché maritime de Pékin dans l’océan Indien. La frontière sino-pakistanaise est impraticable car très montagneuse. Toute route, reliant Gwadar au nord, passe nécessairement par l’Afghanistan, d’où la nécessité de pacifier la région.

Le choix du Badakhchan est également intéressant. Bien que la province soit frontalière de la Chine, le corridor de Wakhan (séparant le Tadjikistan du Pakistan et bordant le Xinjiang chinois) est lui aussi impraticable. En revanche, le Badakhchan afghan est accessible via le Haut-Badakhchan tadjik (région du Pamir). Une route frontalière relie les deux régions montagneuses aux alentours de la ville tadjike de Khorog. C’est donc le chemin le plus court pour passer de la Chine à l’Afghanistan. Ensuite, le Badakhchan afghan est une région relativement sure : durant la guerre contre les Taliban (1994-1998), elle était tenue par l’Alliance du Nord. C’est une région à majorité tadjike qui connait peu les insurrections du pays. C’est donc un lieu idéal pour implanter une base en Afghanistan.

Bases et interventions en Asie centrale

Depuis la chute de l’URSS, les bases militaires étrangères se sont multipliées en Asie centrale. Outre les bases russes du Tadjikistan, du Kazakhstan et du Kirghizstan, l’Inde et les Etats Unis sont militairement présents. Dans le cas indien, c’est une base au Tadjikistan qui sert d’appui à l’armée indienne contre le Pakistan. Les Américains ont quant à eux des bases en Afghanistan, et ont ouvert une base au Kirghizstan, qui a fermé depuis. Que ce soit les conflits d’Asie centrale des années 90 (Tadjikistan, vallée de Ferghana) ou l’intervention américaine en Afghanistan, la présence militaire régionale est désormais importante. Il était logique que la Chine cherche à y participer. Toutefois, le rôle de cette base n’est pas encore clair : si elle est présentée comme une base afghane construite par la Chine, il reste probable que Pékin l’utilise pour déployer, si besoin, ses propres troupes, sans passer pour une armée d’occupation.

Depuis l’annonce du retrait américain d’Afghanistan, des soldats chinois sont présents occasionnellement dans le pays, sans qu’il n’y ait d’intervention officielle. L’un des objectifs est de sécuriser la région afin de favoriser la Belt and Road Initiative chinoise. Toutefois, Pékin a également pour objectif de lutter contre le terrorisme, et d’empêcher  ainsi la création d’un sanctuaire afghan pour les groupes insurgés ouighours du Xinjiang. Depuis les années 2000, plusieurs Ouighours se sont engagés dans les rangs d’Al Qaida ou de Daesh en Syrie. Si l’Etat Islamique en Syrie et au Levant est aujourd’hui tenu en échec, la situation du groupe Daesh – Province Khorasan, présent en Afghanistan, est loin d’être réglée. Un afflux de combattants ouighours au sein de Daesh en Afghanistan est donc possible et représenterait une double menace pour Pékin. D’un côté, les intérêts chinois seraient des cibles en Afghanistan, de l’autre, le groupe pourrait planifier des attaques contre la Chine, en lien avec les organisations ouighoures toujours présentes au Xinjiang.

Après l’ouverture de sa base militaire à Djibouti, afin de sécuriser la route maritime du pétrole, la Chine cherche désormais à accélérer la pacification de l’Asie centrale. C’est dans ce contexte que l’on peut comprendre l’intérêt chinois de construire une base militaire dans la province de Badakhchan.

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